Plan « Peñalolén est Culture » : une citoyenneté culturelle communautaire

1. Contexte

Située dans la province de Santiago, Peñalolén compte une population de 245 000 habitant·e·s. Elle se distingue par sa grande diversité socioéconomique et culturelle et est l’une des communes urbaines ayant la plus grande population indigène au Chili.

Elle est divisée en 5 macro-secteurs : les territoires en situation de plus grande vulnérabilité socioéconomique, les quartiers ayant émergé suite à l’élimination des camps de fortune et les confiscations de terrains ; le secteur andin où existent des pratiques rurales et la partie orientale, où se trouvent les familles des couches socioéconomiques élevées, avec les plus hauts revenus.

2. Peñalolén et la culture

Le Plan voit le jour en 2016 et vise à la décentralisation de l’offre culturelle, en cohérence avec les directives stratégiques du Plan municipal de la culture (2015). En 2016, un Plan transversal est mis au point, qui réunit les domaines de l’éducation (Formarte), des quartiers (Focus de culture), du tourisme (Route Tañi Cheguen) et des projets (diplôme en gestion socioculturelle). Les quatre axes sont les suivants :

  1. développement de la création artistique culturelle ;
  2. sauvegarde et promotion du patrimoine culturel ;
  3. renforcement de la participation citoyenne ;
  4. consolidation de la gestion et des réseaux institutionnels.

L’objectif est de démocratiser l'accès à la culture dans les 5 secteurs de la commune, en décentralisant l'offre de programmation des domaines stables de la corporation culturelle de Peñalolén : Quartiers, Éducation, Tourisme et Patrimoine.

Le Plan contient les principes d’orientation de l’Agenda 21 de la culture, tels que l’engagement envers le développement culturel durable, la décentralisation, le développement du capital culturel, la création de possibilités économiques et de développement artistico-culturel, la garantie des droits culturels et la promotion d’actions dans les zones éloignées des centres spécialisés de culture. De plus, il garantit l’accès équitable aux services culturels des communautés les plus vulnérables (ODD 10), il préserve la culture mapuche et ses pratiques ancestrales, en présentant un modèle de tourisme local qui interagit avec les écosystèmes culturels et stimule la création de services et biens patrimoniaux indigènes (ODD 8), et o•re une programmation, de la formation et des ateliers dans les quartiers les plus vulnérables du point de vue socioéconomique (ODD 4).

3. Objectifs et mise en oeuvre du projet

3.1. Objectifs principaux et spécifiques

L’objectif principal du projet est de démocratiser l’accès à la culture locale, en décentralisant l’o•re de programmation, en accentuant la richesse culturelle des quartiers, leur identité et la participation de leurs habitant·e·s.

Objectifs spécifiques

  • décentraliser l’offre culturelle ;
  • mettre en place des actions conjointes et ouvrir des espaces de dialogue et d’intégration culturelle entre la Corporation culturelle, les autres unités municipales, les artistes, les gestionnaires, les organisations et les espaces culturels ;
  • donner un nouveau sens aux espaces publics, aux locaux communautaires et aux écoles publiques comme centres culturels sur les territoires les plus vulnérables ;
  • développer des capacités d’expression, de gestion, d’administration, de production et d’analyse culturelle par l’intermédiaire de processus de formation.

3.2. Développement du projet

L’objectif du projet est de canaliser et d’imbriquer le culturel dans les autres politiques publiques municipales, en générant des alliances entre unités municipales dans les domaines stables de la Corporation culturelle.

Les actions suivantes ont été définies à cet égard :

  • A. PROGRAMME FORMARTE : alliance entre le domaine de l’éducation de la Corporation culturelle et la Corporation d’éducation, pour stimuler l’éducation artistique intégrale, en garantissant le droit à l’éducation et la participation active à la culture. Programme pionnier à l’échelle nationale. Le programme intègre du théâtre, de la danse et du chant choral dans les programmes scolaires de 8 écoles publiques.
  • B. FOCUS DE CULTURE DE QUARTIER : créés pour le domaine des quartiers. Promeut la vie communautaire autour de la culture et des arts dans 18 quartiers et reconnaît 18 locaux de la communauté comme microcentres culturels pour le développement local, fondés sur la décentralisation culturelle ; la formation aux arts, aux métiers du patrimoine et à la gestion culturelle ; la gratuité des spectacles et ateliers ; la planification et la participation des habitant·e·s, la mise en valeur de l’identité locale et la durabilité des projets culturels.
  • C. DIPLÔME EN GESTION SOCIOCULTURELLE, TERRITOIRE ET POLITIQUES CULTURELLES : école de formation sous convention avec la Faculté des arts de l’Université Académie d’Humanisme Chrétien. Génère des processus de professionnalisation de la gestion culturelle communautaire, avec 5 mois de formation et pratique dans la gestion intégrale de projets. Permet d’activer un réseau de collaboration et consolider le tissu socioculturel de Peñalolén.
  • D. ROUTE INDIGÈNE TAÑI CHEGUEN : service touristique patrimonial de la culture ancestrale mapuche de Peñalolén. Met en place des circuits éducatifs pour la mise en valeur et la promotion du patrimoine culturel immatériel lié aux expressions, techniques et cosmovision de la culture mapuche, par le biais d’ateliers, expositions, dégustations et discussions proposées par des associations et les praticien·ne·s indigènes.

4 programmes ont été mis en place : le programme Formarte, les Focus de Culture de Quartier, le Diplöme en Gestion socioculturelle, Territoire et Politiques culturelles et la Route Tañi Cheguen. 

Une fois ces 4 programmes intégrés au Plan directeur de la culture, trois phases de travail ont été définies : coordination et gestion, mise en oeuvre du programme, et évaluation et durabilité.

Population bénéficiaire

  • A. FORMARTE : 8 000 élèves dans 8 écoles publiques, avec les plus hauts niveaux de vulnérabilité socioéconomique de la commune.
  • B. FOCUS DE CULTURE DE QUARTIER : 1 200 habitant·e·s se sont formé·e·s dans les ateliers et plus de 9 000 personnes ont été spectatrices des activités artistiques annuelles.
  • C. DIPLÔME EN GESTION SOCIOCULTURELLE, TERRITOIRE ET POLITIQUES CULTURELLES : 45 dirigeant·e·s, gestionnaires, artistes et praticien·ne·s locaux·les ont reçu une bourse pour le cours de spécialisation universitaire.
  • D. ROUTE INDIGÈNE TAÑI CHEGUEN : 6 organisations indigènes participantes. Aujourd’hui, la route touche 300 personnes.

Parmi les obstacles du projet : le manque de temps, de capacités spécifiques à la planification stratégique et le manque de professionnel·le·s en psychologie, sociologie et travail social pour une intervention intégrale. De même, le retard dans l’attribution des ressources et en particulier leur insu¥sance font obstacle à la mise en oeuvre de Formarte dans la totalité des écoles publiques et le programme Focus de culture dans les 30 quartiers défavorisés de la commune.

4. Impacts

4.1. Impacts directs

Le Plan est reconnu à l’échelle régionale et nationale comme une bonne pratique de la gestion culturelle publique. Nous avons été invité·e·s à présenter la méthodologie du Programme Formarte au cours de différents séminaires internationaux d’éducation artistique et 30 stages sont e•ectués annuellement par des gouvernements locaux du pays afin de connaître l’expérience et essayer de la reproduire sur leur territoire respectif.

Impact sur les collectivités locales

On remarque une augmentation durable des investissements sociaux, avec des ressources économiques, matérielles et humaines, avec la mise à disposition d’espaces dignes pour le développement artistique et culturel. La politique culturelle est intégrée aux autres unités municipales et politiques publiques.

Impact sur le secteur culturel

Les agent·e·s culturel·le·s maintiennent un canal de communication permanente et font partie des processus de conception des plans et des programmes. Ils et elles ont pu bénéficier d’une formation universitaire, de cours et de rencontres pour évaluer et ébaucher le Plan. Grâce à la croissance de la participation e•ective et permanente des artistes et des gestionnaires, en 2020 un groupe de programmation sera créé, composé d’agent·e·s locaux·les, en vue d’élaborer une o•re annuelle et les nouvelles politiques culturelles 2020-2030.

Impact sur la région

Avec ses plus de 20 000 participant·e·s, le projet a élargi la présence municipale sur les territoires auparavant fermés aux institutions municipales, générant ainsi de la confiance et encourageant la mise en place d’autres activités dans les nouveaux espaces, de façon régulière. Une transformation sociale a été engrangée, permettant des dialogues avec l’objectif de transformer Peñalolén en commune inclusive, démocratique et équitable.

Le Plan est reconnu à l'échelle régionale et nationale comme une bonne pratique de la gestion culturelle publique. Annuellement, 30 stages sont effectués par des gouvernements locaux du pays, afin de reconnaître l'expérience et déterminer les possibilités de la reproduire.

4.2. Évaluation

Depuis 2018, un plan d’évaluation est mis en place. Son mécanisme est composé de fiches de planification, d’enquêtes de satisfaction et d’évaluations collectives d’équipes avec les homologues et les formateur·rice·s. L’enquête évalue la qualité de la formation, de la logistique et le respect des objectifs, entre autres. L’évaluation tient également compte de la participation, de la qualité du travail des participant·e·s et des résultats obtenus.

4.3. Facteurs clefs

  1. Décentralisation territoriale.
  2. La culture comme pilier du développement humain : la politique culturelle nourrit les autres politiques publiques locales de sécurité des personnes, entrepreneuriat, éducation, communauté et famille, et planification stratégique.
  3. Approche participative/identitaire : la perspective des droits humains inclut tous les bénéficiaires tout au long du processus (conception, mise en oeuvre et évaluation).
  4. Impact/reconnaissance : la communauté souligne et reconnaît le Plan.
  5. Réseaux et associations : en 4 ans, 16 institutions culturelles, éducatives et entrepreneuriales ont signé des conventions avec le Programme.

4.4. Continuité

Un point fort du Plan est l’engagement municipal à administrer et donner de la continuité aux 4 programmes et ce de façon continue depuis 2016. Une équipe de professionnel·le·s s’y consacre exclusivement, avec de l’expérience dans la gestion culturelle et du soutien dans le domaine de la communication et de la production. Les alliances avec les autres unités municipales et leurs politiques doivent être approfondies, ainsi que de nouvelles conventions avec d’autres gouvernements locaux (promotion) et institutions.

Chaque année, de nouvelles stratégies d’intervention sont intégrées pour élargir la couverture, améliorer l’organisation et effectuer un suivi.

70 % du Plan est financé par une subvention municipale, qui augmente chaque année. De même, l’extension (de la programmation artistique) est financée grâce aux Fonds de la culture du ministère et le Fonds national de développement régional (30 %).

5. Plus d’informations

Peñalolén a été candidate à la quatrième édition du Prix international CGLU-Ville de Mexico-Culture21 (novembre 2019 - mai 2020). En juin 2020, le jury a publié son rapport final et demandé à la Commission Culture de CGLU de promouvoir ce projet comme exemple de bonne pratique de la mise en oeuvre de l’Agenda 21 de la Culture.

Cette fiche a été rédigée par Gladys Sandoval Campos, directrice de la Corporation culturelle de Peñalolén, région métropolitaine de Santiago, Chili.

Contact : alcaldesa (at) penalolen.cl

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