Paysandú est culture

Background

Paysandú se distingue comme l’un des rares départements à avoir été fortement industrialisé au XXe siècle en Uruguay, transformant un schéma sociopolitique fort d’un très riche tissu social de grand sens historique, capable de se structurer en récits de notre devenir, pour nous penser nous-mêmes à la lumière du futur.

Toutefois, de la désindustrialisation systématique à l’échelle nationale pendant la dictature jusqu’à la crise économique de 2001-2002, cette caractéristique a changé. La société intégrée, dotée d’une classe moyenne solide a été partiellement remplacée par une société double ; l’une fière de son passé, à laquelle succède souvent une société qui abandonne peu à peu les traits façonnant son identité. Paysandú continue malgré tout d’afficher des points forts comme des points faibles dans ce paysage contextuel. Ses points forts les plus remarquables ont à voir avec le capital social vigoureux sanducero, qui se distingue par un certain esprit d’entrepreneuriat et la vie associative. Ses faiblesses les plus criantes touchent à la permanence de certaines restrictions historiques qui limitent son développement.

Cette dernière décennie, au travers de différentes politiques sociales, culturelles et économiques, d’importants efforts ont été déployés pour surmonter les limites existantes et promouvoir le développement durable.

Paysandú et la cultura

Au cours du dernier congrès du Front Large (2008), il était souligné que la culture uruguayenne sortait d’une situation d’urgence, aggravée ces dernières décennies et se caractérisant par l'abandon des installations municipales et le manque de soutien des gouvernements nationaux à l’élaboration de politiques culturelles. Il s’avérait nécessaire de déployer une série de stratégies de développement culturel à toutes les actions de l’État.

L’objectif à remplir dans notre société : le droit à être considéré·e comme « sujet » créateur·rice et porteur·se d’une culture propre dans la communauté et le droit à l’usage et à la jouissance de l’ensemble des biens culturels.

Au travers de :

• la promotion de l'accès à la jouissance des biens culturels ;
• l'élaboration d’interventions urbaines dotées d’infrastructures culturelles de qualité pour l’intégration sociale ;
• le renouvellement de l’élan donné aux politiques patrimoniales ;
• le développement de la production, diffusion et distribution de biens culturels ;
• la protection des droits des travailleur·se·s de la culture ;
• l’encouragement au bon usage du langage pour l'intégration sociale.

La politique culturelle est dirigée et articulée par le gouvernement local aux côtés des acteur·rice·s de la société civile du département de Paysandú. L’Intendance joue un rôle fondamental dans la garantie de la représentation démocratique et la diversification afin de susciter une participation active (prise de décisions et accès) des acteur·rice·s locaux·les. Les nouvelles logiques de développement requièrent des formes de coordination sous l’angle de la gouvernance territoriale, promotrice d’une large participation de la société. Ainsi, le principal problème que l’on cherche à résoudre est de garantir les droits culturels à toute la société, en reconnaissant la diversité culturelle comme facteur primordial de la constitution de tout projet socioéconomique d’un territoire. Le gouvernement local promeut des politiques culturelles dans le cadre du développement des industries créatives dans la région.

Paysandú mène actuellement un processus de reconversion de la culture pour la transformer en une dimension d’industries créatives avec impact économique sur le territoire. De cette façon, les différentes expressions culturelles traditionnelles telles que le théâtre, la musique et la danse sont reliées au secteur de l’audiovisuel, du graphisme, des jeux vidéo et de l’édition.

L'objectif est de garantir dans notre société le droit à être considéré.e sujet créateur.rice, porteur.se d'une culture propre.

Les principes de l’Agenda 21 de la culture et la politique culturelle du département de Paysandú sont reliés au travers des objectifs spécifiques de cette dernière avec les cibles des ODD, en vue d’aborder la durabilité à partir des actions transversales de chaque pilier du développement durable.

Concernant la diversité culturelle et le dialogue interculturel, la priorité a été donnée au développement de différents patrimoines culturels et à la promotion de l’échange artistique et culturel à l’échelle nationale, ainsi que l’intégration régionale, surtout dans la zone littorale uruguayo-argentine. Du côté des droits humains et de la démocratie participative, il a été privilégié de faciliter l'accès de la population aux produits et biens culturels ; de former les artistes et de produire des biens culturels.

La politique culturelle de Paysandú est conçue principalement pour contribuer à l’équité sociale au travers de la promotion des biens et des services culturels locaux qui favorisent la réduction des inégalités sur le territoire (ODD 10).

D’autre part, la dimension culturelle est un facteur fondamental pour la réalisation de l’Objectif 11. En ce sens, la politique du gouvernement actuel de Paysandú met l’accent sur la récupération du patrimoine culturel matériel et immatériel, en replaçant le capital symbolique, avec pour objectif de redonner du sens à l’identité locale.

La promotion de la production locale de biens et services culturels se répercute directement sur le développement économique de la ville, lié au tourisme culturel et au potentiel de développement d’initiatives artistiques, pour créer des possibilités pour les personnes du secteur. La politique culturelle locale a permis de forger des alliances avec les organisations de la société civile et les collectifs culturels, les institutions ou les entreprises qui cherchent à stimuler l’offre d’activités et d'actions, générant des retombées économiques selon une approche intégrale.

Positionner Paysandú comme pôle de développement culturel, entraînant ainsi un impact élevé au travers d'actions et initiatives qui rendent compte d'un processus constant.

Objectifs et mise en oeuvre du projet

Objectif principal

Démocratisation réelle de l’accès et promotion des biens et services culturels. Inclusion et décentralisation de toutes les manifestations et activités des industries créatives.

Objectifs spécifiques, développement et actions

1. Faciliter l'accès de la population aux biens et services culturels, développement d'ateliers gratuits donnés par des agents reconnu·e·s à l’échelle nationale qui visent à former, stimuler, renforcer et promouvoir les talents locaux (chant, illustration infantile, percussions, carnaval). Mise en avant de programmes éducatifs des musées départementaux en coopération avec les écoles, les collèges et les centres pour les jeunes, ainsi que travail avec le Centre de réhabilitation psychosocial, avec promotion de l’inclusion des patient·e·s psychiatriques au travers d’ateliers de céramique.
2. Décentraliser l'accès, la formation, la promotion de l’artiste/acteur·rice culturel·le et des biens culturels, au travers d’un travail avec les enseignant·e·s dans les localités de l’intérieur du département, dans les domaines des danses folkloriques, des rythmes latinos, du dessin, du théâtre et de l’esthétique intégrale. Une formation à l’élaboration de projets culturels, à leur marketing et leur communication est dispensée par la Faculté de la culture de CLAEH, en accord avec le gouvernement local, et à laquelle participent 20 agents culturel·le·s de différents domaines.
3. Hiérarchiser et développer différents patrimoines culturels et la promouvoir l’échange artistique et culturel à l’échelle nationale, ainsi que l’intégration régionale, dans la zone littorale uruguayo-argentine. Récupération des infrastructures symboliques patrimoniales comme la réinterprétation de l’ancien parc zoologique, pour le transformer en parc écologique ; la rénovation du cinéma Astor pour en faire un espace itinérant culturel et améliorer l’offre de scènes artistiques et le repositionnement du Théâtre Florencio Sánchez, avec une programmation en continu toute l'année.
4. Cette stratégie de mise en valeur des patrimoines matériels du département est menée en collaboration avec la Commission départementale du patrimoine de Paysandú et la Fondation Les Amis de Florencio Sánchez. La sauvegarde et la préservation du patrimoine matériel et immatériel sont encouragées selon une démarche de participation publique-privée d’un groupe de citoyen·ne·s de façon honoraire. Concernant les échanges, une rencontre entre chorales a été organisée à Paysandú, avec la participation de choeurs venant de Montevideo, Salto et Colón (Argentine), ainsi que le 1er concours international de poésie « Anibal Sampayo » et le 1er, 2e et 3e salon binational de la céramique, avec des jurys binationaux.
5. Positionner le département de Paysandú comme attraction culturelle, à partir de la construction de l’identité territoriale. Pour la première fois, Paysandú a été le siège secondaire du Festival international des arts scéniques. L’Agenda culturel est intégré au projet du Circuit des oiseaux peints (touristique), qui réunit six gouvernements locaux du littoral uruguayen. Positionnement du festival « Semaine de la bière », fête traditionnelle locale qui cumule 52 éditions et assure la sauvegarde de l’identité culturelle. Réalisation du 1er Forum des villes : Culture et tourisme pour le développement durable, avec la participation d’exposant·e·s de premier plan nationaux et internationaux.

La sauvegarde et la préservation du patrimoine matériel et immatériel sont encouragées selon une démarche de participation publique.

Enfin, une Marque de Ville est en cours d’élaboration, avec pour objectif de positionner le département en fonction de l’identité culturelle et du développement productif. Ce processus a été réalisé avec tou·te·s les citoyen·ne·s au travers de consultations, forums et travaux collectifs, avec pour objectif de conduire à des idées communes.

De cette politique culturelle, il convient de signaler la redynamisation d’événements culturels, l’intégration d’activités innovantes et la sauvegarde du patrimoine de valeur :

• « Laisse une histoire et emportes-en une nouvelle », un programme novateur d’échanges de livres dans la station thermale municipale, qui lui a valu une répercussion médiatique à l’échelle locale, nationale et même en Argentine.
• Salon du livre : unique dans la zone métropolitaine, récompensé par le Prix Legionario, décerné par la Chambre du livre (2017).
• Nuit des musées : troisième édition du circuit nocturne, qui inclut depuis 2015 la bibliothèque municipale de forme innovante.
• Bus touristique. Le collectif Espace Imagine élabore un itinéraire de la ville en racontant des histoires sous forme théâtrale.
• « Un enfant, un instrument » : l’un des niveaux du programme a été déployé dans le Quartier Chaplin, qui constitue une expansion de la ville vers le nord-est, en raison d’un risque élevé d’inondations et d’exclusion sociale. Déplacement de la ville à Montevideo et présentation à l’Auditorium national du Sordre, avec pour répercussion un changement social pour toutes les familles accompagnatrices du processus.
• Groupes Lubolas : ateliers de formation dans le quartier d’où proviennent ces groupes, en misant sur la territorialisation des politiques et en promouvant la reconnaissance d’une localité aux conditions socioéconomiques vulnérables.
• Microthéâtre post-industriel : atelier laboratoire de création scénique dans une ancienne usine industrielle.
• Festival de muralisme dans la ville.
• Mise en place de la première rencontre régionale du Marché des industries créatives d’Uruguay et participation au Marché des industries créatives d’Argentine.

Impact

Impacts directs

Impact sur le gouvernement local

Changements de perspective tant chez les faiseur·se·s de politique du gouvernement local que chez les acteur·rice·s locaux·les. Un processus de changement des habitudes a été mis en oeuvre, tout comme la démocratie et la démocratisation des droits culturels. Le principal défi a été de modifier les logiques de demande continue des acteur·rice·s locaux·les du gouvernement local ; construction collective de propositions et gouvernance multiniveaux. À la recherche d’un processus constant, l’impact que l’on entend provoquer est le positionnement de Paysandú comme pôle de développement culturel du pays, au profit de ses habitant·e·s.

Impact sur la culture et les agents culturel·le·s locaux·les

Depuis 2015, on souligne la consolidation d’événements et activités, une augmentation marquante de la participation et de la production, l'accroissement des échanges (locaux, nationaux et internationaux), la décentralisation dans la production et la programmation culturelles sur demandes locales.

Évaluation

Jusqu'à présent, l’évaluation est quantitative et concerne notamment la quantité/qualité des actions au travers des registres de participation citoyenne aux activités mises en oeuvre (listes d’accréditation et de participation).

Ces listes apportent des informations sur la quantité de participant·e·s mais aussi sur leurs caractéristiques, ce qui permet de connaître le profil de chacun·e. Elles rendent possible l’évaluation de cette politique et le suivi de sa mise en oeuvre.

Ces listes apportent des informations non seulement sur la quantité de participant.e.s mais aussi sur leurs caractéristiques, ce qui permet de connaître le profil de chacun.e. Ces informations rendent possible l'évaluation des différentes phases du cycle de cette politique.

Facteurs clefs

Mise en oeuvre de politiques de développement intégrales promues et dirigées par le gouvernement départemental, avec l'exécution de politiques spécifiques de développement durable, selon une approche transversale et une articulation horizontale-territoriale.

Planification stratégique pour le renforcement de la culture, inclusion du dialogue avec la société et secteurs pour leur autonomisation.

Reconnaître la diversité culturelle et les collectifs artistiques historiquement exclus des politiques et générer du capital social dans des contextes n’ayant que peu de liens avec les institutions.

Continuité

La continuité sera obtenue en mettant en valeur l’activité culturelle, artistique et touristique, en accroissant son poids dans l’ensemble des activités et en promouvant la participation des citoyen·ne·s comme mécanisme d’appropriation et de jouissance. De plus, le travail en réseau avec les collectifs, les organisations de la société civile, les entreprises et les institutions permettra de continuer avec la complémentarité des actions de promotion de la culture. La revalorisation des tâches des fonctionnaires municipaux·les est essentielle à l’application des axes stratégiques, en les autonomisant dans les activités culturelles et les propositions, tout en consolidant le capital humain.

Pour garantir cela, il faut : améliorer les niveaux de formation, l’apport/accès aux biens et aux services culturels/éducatifs, composantes d’un processus à long terme.

Information supplémentaire

Paysandú a été candidat à la troisième édition du Prix international CGLU-Ville de Mexico-Culture21 (novembre 2017 - mai 2018). En juin 2016, le jury a publié son rapport final et demandé à la Commission Culture de CGLU de promouvoir ce projet comme exemple de bonne pratique de la mise en oeuvre de l'Agenda 21 de la Culture.

Cette fiche a été rédigée par : M. Renzo Torres, responsable de l’unité de gestion pour le développement (direction du développement productif durable) de l’Intendance départementale de Paysandú. Paysandú, Uruguay.