Politique culturelle de Trois-Rivières

Contexte

Fondée en 1634, Trois-Rivières est la deuxième plus ancienne ville francophone au Canada, et la 9ème ville la plus importante du Québec, chef-lieu de l’administration régionale où siègent les sections régionales des ministères provinciaux. Avec 137 000 habitants, c’est aussi le principal pôle culturel de la Mauricie, regroupant des institutions culturelles de premier plan : université, collèges, conservatoire, orchestre symphonique, salles de spectacle, amphithéâtre, musées, galeries d’art, centres d’exposition et sites patrimoniaux.

Alors que sa prospérité a longtemps reposée sur l’industrie manufacturière et papetière, entrée en crise dans les années 1990s, aujourd’hui la ville témoigne également d’un fort dynamisme culture, du fait de la forte concentration d’institutions culturelles, de festivals et manifestations culturelles et d’artistes de renommées nationale et internationale, ce qui lui a d’ailleurs valu le titre de Capitale culturelle du Canada en 2009.

Trois-Rivières et la culture

Dans les années 1990, l’industrie papetière canadienne, sur laquelle reposait la majeure partie de l’économie locale, subit de profondes transformations entrainant la fermeture d'usines et la perte de nombreux emplois. Face à ce constat, la Ville se met à la recherche de nouveaux objectifs de développement, et choisit de faire de la culture un moteur de transformation et de développement économique.

Alors que jusqu’ici, l’action culturelle de la Ville se concentrait sur la gestion des lieux culturels dont était est propriétaire (salles de spectacle, Maison de la culture et bibliothèque municipale), et que les organismes culturels devaient se débrouiller avec leurs propres moyens, la ville décide de se doter d’une politique culturelle.

À partir du début des années 1990, Trois-Rivières devient l'une des premières villes du Québec à se doter d'une politique culturelle alors que les arts et la culture commencent à occuper une place de plus en plus grande dans la composition du tissu social, économique et communautaire.

Pour mettre en œuvre cette politique, la Ville crée dès 1997 un organisme sans but lucratif, la Corporation de développement culturel, (aujourd’hui Culture Trois-Rivières), chargé de faire la liaison entre l’administration municipale, les différents acteurs de la scène culturelle et les citoyens. Une impulsion supplémentaire est donnée en 2002 à l’occasion de la fusion de 6 municipalités pour former le nouveau Trois-Rivières. Enfin en 2015, une autre organisation sans but lucratif, la Corporation des évènements de Trois-Rivières, voit le jour.

Au fil des années, la culture a ainsi intégré divers aspects du développement local, transformant le visage et l’identité de la ville, et s’incorporant durablement dans les différentes politiques de la ville : politique familiale (2004), politique d’intégration des personnes handicapées (2005), politique de développement social (2005), politique d’art public (2006), Municipalité amie des aînés (2012), stratégies de développement touristique développées par l’organisme responsable du tourisme (IDÉ). Plus récemment, des acteurs ont également participé au comité de révision de la politique du développement durable (2018).

Objectifs et mise en oeuvre du projet

Objectifs principal et spécifiques

La Politique culturelle de Trois-Rivières vise à faire de la culture un moteur de développement durable pour la ville, et un facteur-clé de développement touristique, social et de renforcement du sentiment d’appartenance et de fierté de la population.

À travers trois volets social, économique et culture, elle poursuit des objectifs spécifiques :

  • TFaciliter l'accès à la culture pour tous, particulièrement pour les plus défavorisées et les jeunes, et en faire un outil d’intégration sociale.
  • Faire de la culture un facteur d'attractivité, à travers le développement touristique et l’activité économique générée par le secteur culturel.
  • Faire de la culture un élément fédérateur autour de l’identité de la ville et une source de fierté pour la population, en transformant son image.

Développement du projet

Principales actions réalisées

La vitalisation du centre-ville

La vitalisation du centre-ville a été au cœur de la volonté de mettre la culture au cœur du quotidien des Trifluviens et d’y insuffler un dynamisme nouveau. Cela s’est traduit par un soutien financier renouvelé aux organismes culturels, l’accompagnement de nombreux évènements culturels, des travaux de réfection et d’amélioration des infrastructures culturelles, des animations estivales de rue, et l’adoption d’une nouvelle image de marque « Très Trois-Rivières » qui fait référence à la multitude de qualificatifs possibles pour décrire notre ville. Dans ce cadre, un Comité « Action centre-ville » a été créé, pour faciliter la concertation régulière des acteurs économiques, commerciaux, événementiels, culturels et aménagement du territoire.

La politique culturelle de Trois-Rivières est structurée en trois volets principaux : un volet social, un volet économique, et un volet culturel, qui s'illustrent par plusieurs projets phares.

Le programme de lutte contre l'exclusion culturelle et la médiation culturelle

Dès 2003, un programme de lutte contre l'exclusion culturelle a été mis en place afin d'améliorer l’accessibilité aux arts et à la culture aux citoyens exclus de la vie sociale et culturelle, en particulier les classes ouvrières et populaires. Elle a ainsi fait de l’accès à la culture un droit fondamental, en particulier à travers le recours à la médiation culturelle.

Plusieurs actions ont été menées dans ce sens : un Club culture qui facilite l’accès aux biens culturels ; des résidences d’artistes dans les écoles, les organismes communautaires et les résidences pour aînés (par exemple une collaboration entre un artiste et des jeunes de la rue pour créer un projet de piano public) ; le soutien à des projets portés par des organismes communautaires (livres, expositions) ; des circuits et rencontres d’artistes pour les nouveaux arrivants. En 2015, les grandes lignes de cette politique ont été revues pour un dialogue renouvelé au sein de la collectivité.

La diffusion culturelle et des infrastructures majeures

La concentration culturelle et le dynamisme artistique sont des facteurs clés pour faire de la culture un enjeu de développement touristique et économique. Ainsi, Trois-Rivières compte une dizaine de festivals et d’évènements, dont quatre de notoriété internationale, que deux ateliers d’artistes autogérés, deux maisons d’édition, un orchestre symphonique, et une compagnie de théâtre à la renommée internationale - les Sages Fous. Au total, près de 70 organismes culturels contribuent à la vitalité culturelle.

Trois-Rivières dispose également d’infrastructures municipales de qualité, dont six salles de spectacle, un centre d’exposition, un musée, deux sites patrimoniaux, un arrondissement historique, une église reconvertie en lieu culturel, cinq bibliothèques et un amphithéâtre extérieur de 8000 places.

Entre 2002 et 2017, le soutien financier de la ville aux organismes culturels à été multiplié par 8.

Trois-Rivières sur Saint-Laurent

Trois-Rivières sur Saint-Laurent, est un autre projet phare de la politique culturelle de Trois-Rivières, qui a consisté en la rénovation de l’ancien moulin à papier Canadian International Paper (CIP), jadis le plus important au monde, qui a depuis fermé ses portes. En s’appropriant cet immense terrain, la ville en a fait un lieu de vie attrayant et unique. Conçu autour des berges du fleuve Saint-Laurent et de la rivière Saint-Maurice ouvertes au public d’une part, l’aménagement comprend aussi l’ancienne industrie papetière Boréalis et un nouvel amphithéâtre.

C’est en 2010 que l’ancienne usine de filtration à eau, site patrimonial historique, a été reconvertie en musée Boréalis, permettant aux Trifluviens de renouer avec leur passé industriel et de rendre hommage aux anciens bûcherons, draveurs et ouvriers de la ville. Puis en 2015, la construction de l’Amphithéâtre Cogeco sur un terrain resté inaccessible pendant près de 100 ans marque une nouvelle étape dans la diversification de l’offre culturelle estivale Trifluvienne. Ce lieu unique offre un nouvel espace de rassemblement et de détente, et une programmation avec un partenariat exclusif avec le Cirque du Soleil.

Un engagement financier important

L’investissement de Trois-Rivières dans la culture s’élevait en 2016 à 200,22 CAD par habitant, soit 9,1% du budget total de la Ville, l’un des plus haut montant parmi les villes du Québec. Entre 2002 et 2016, ces dépenses ont plus que quadruplé, passant de 6,2 M CAD à 27,2 M CAD.

Impacts

Impacts directs

Impact sur le gouvernement local

En 2015, une nouvelle direction « Culture, Loisirs et Vie communautaire » a été créée pour assurer plus de cohésion et transversalité entre les départements municipaux et les organisations sans but lucratif qui y sont rattachées (Culture Trois-Rivières et la Corporation des événements de Trois-Rivières).

Impact sur la culture et les acteurs culturels de la ville

La Ville accrédite et reconnait aujourd’hui environ 70 organismes culturels et artistiques sur son territoire, et a augmenté son soutien financier de 295 060 $ en 2002 à 2 269 380 $ en 2017 : compagnies de théâtre, orchestre symphonique, chœurs, compagnies de danse, ciné-club, lieux patrimoniaux, musées, etc.

Impact élargi sur la ville ou le territoire et sa population

La Politique culturelle a permis de transformer le centre-ville ainsi que l’ancien terrain de la CIP pour en faire un vaste espace public (Trois-Rivières sur Saint-Laurent). Par ailleurs, plus de 2 000 manifestations culturelles sont offertes chaque année aux citoyens (personnes âgées, petite enfance, écoles primaires et secondaires, citoyens des quartiers défavorisés, etc.) À eux seuls, l’amphithéâtre et Boréalis attirent plus de 200 000 visiteurs annuels, et les 36 spectacles composant la saison de l’amphithéâtre Cogeco ont attiré un total de 48% de spectateurs originaires de la Mauricie et 52% de l’extérieur de la région. Les retombées économiques et touristiques ont notamment permis à Trois Rivières de diversifier son économie.

Grâce au processus de concertation et d'évaluation, une nouvelle définition de la médiation culturelle a vu le jour, les orientations ont été redéfinies et un plan d'action est en cours de réalisation.

Évaluation

La concertation et la proximité avec les organismes culturels, communautaires, scolaires ainsi que les instances de développement économique permettent de réajuster constamment les orientations de la politique et le développement des activités. Une consultation a été menée avec les organismes culturels, communautaires et scolaires pour la révision du plan stratégique de médiation culturelle.

Facteurs clefs

  • Le sentiment d’appartenance et de fierté de la population.
  • L’étendue des actions et la concertation avec de multiples partenaires.
  • Les valeurs inclusives et la volonté politique de tous les échelons décisionnels.
  • La participation du public aux activités culturelles.

Continuité

La Ville compte maintenir ses diverses ententes avec ses partenaires ainsi que ses acquis en terme d’infrastructures culturelles (projet à venir de mise aux normes de la salle principale de spectacle). La Ville travaille à actualiser ses programmes de soutien aux organismes culturels et vise prochainement à réviser sa Politique culturelle afin de favoriser encore plus la participation citoyenne, tout en conservant les acquis en matière de diffusion de la culture et de développement du tourisme culturel.

La Ville envisage enfin de procéder à une réforme en profondeur de sa Politique culturelle pour répondre davantage aux principes et objectifs de l'Agenda 21 de la culture, notamment concernant les droits culturels et la participation citoyenne. Un diagnostic culturel de la ville va être réalisé pour, d’une part, mesurer le chemin parcouru depuis les 20 dernières années et, d’autre part, initier un nouveau dialogue entre les différents acteurs de la scène culturelle et les citoyens.

Informations relatives

La Ville de Trois-Rivières a été candidate à la troisième édition du « Prix International CGLU – Ville de Mexico – Culture 21” (novembre 2017-mai 2018). Le Jury du Prix a élaboré son rapport final en juin 2016 et a demandé à la Commission culture de CGLU de faire rayonner ce projet comme étant une pratique exemplaire de la mise en œuvre de l’Agenda 21 de la Culture, et comme mention spéciale de la troisième édition du Prix.

Cette fiche a été réalisée par Nancy Kukovica, Chef de division – Culture à la Ville de Trois-Rivières, Québec, Canada.

Contact : nancy.kukovica@v3r.net

Site web de référence : www.v3r.net

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